Plaines et Vallées 1989
Articles de Yvonick Jambon et Rémy Roussel photos Hugues Laroche


La dernière pièce de théatre de la saison des Rallyes TT affiche complet;
comprenez par là que cette année encore plus de 160 inscrits avaient bravé le froid de ce mois de novembre, pour s'éclater ou dire simplement j'étais là.
Impressionnant quand on sait que certains aurait voulu y être mais que le nombre des engagés étant limité, ils ont du se cantonner au rang de spectateurs.
Quel plateau ! Ils étaient tous là, des invités de marque comme le rallyman J.P. Rouget, habitué de l'épreuve, et pas moins de 18 pilotes anglais complétaient la liste des engagés.
La délégation anglaise toujours présente avec ces fameux Land Rover style armoire normande, avait cette année fait le déplacement avec des 4 x 4 plutôt teigneux (Mercedes, Lada, Mitsu...)
mais aussi avec des class 2 US plûtot rares en TT, notamment avec le champion britannique Sargeant.
Pour couronner cette finale, la météo rigoureuse, voire même froide pour ne pas dire glaciale, n'avait pas omis de réserver de superbes rayons de soleil.
Vous me direz les faits? et seulement les faits! Donc pour résumer la situation,
deux pilotes sont encore en compétition pour le titre de champion de France. P. Philippe a seulement quelques points d'avance sur Y. Pachiaudi.
La décision aura obligatoirement lieu ce week-end. En gros, que du spectacle. Et le public en prendra plein les yeux.
Les organisateurs annonçaient la finale du Championnat de France,
ils ne croyaient pas si bien dire! La lutte entre Pachiaudi et Philippe fut de toute beauté à tel point qu'au départ de la dernière spéciale, le titre n'était pas encore décerné.

Au départ les données étaient des plus simples pour Pachiaudi puisqu'il devait impérativement terminer devant Philippe et au pire à la première ou seconde place.
Tâche particulièrement ardue (notamment sur le terrain) d'autant que les forces en présence possédaient de sérieuses références.
Tout d'abord Briavoine le « régional de l'étape» qui, assuré d'une troisième place au Championnat avait l'esprit tranquille
et espérait bien conclure la saison en beauté, mais aussi Max Forin qui revenait pour cette occasion à ses premières amours après avoir exercé ses talents en Endurance TT,
Desjouis régulièrement aux avant-postes au volant de son Phil's car, Rivet et, parmi l'imposante colonie anglaise le champion des épreuves· « off road» outre manche,
Sargeant sur un buggy proche des « class-one» américains. Fimbel pour sa part pointait aux abonnés absents, son moteur ayant cassé durant des essais la semaine précédant l'épreuve.
Dès le prologue disputé à la périphérie d'Evreux, la surprise venait de Genty (Phil's car) qui réalisait le meilleur chrono lui offrant le privilège (?) d'ouvrir la route
pour la boucle du samedi devant Philippe, Rivet, Briavoine, Guillemin et Pachiaudi.
Dans la rapide spéciale de Chavigny, Briavoine annonçait la couleur en 7'38" laissant son second Rivet à 16", Philippe à 17" et Pachiaudi à 27" .
A voir le visage de ce dernier à la sortie de ce chrono, il ne faisait aucun doute que les choses n'allaient pas pour le mieux,
de même que pour Poincelet qui était aux prises avec un interrupteur de contact capricieux occasionnant des coupures moteur,

 


Guillemin : à classer dans les "vites"

Genty leader éphémère victime d'une rupture d'arbre de transmission l'obligeant à continuer en 2roues motrices
et Cosson qui, décidement poursuivi par la poisse, cassait Je cable d'accélérateur 200 mètres après le dépéJrt. Cap sur l'ES 2 et premier coup de théâtre,
Briavoine rendait le carnet de bord, un guide de soupapes s'étant décidé à aller voir plus bas ce qu'il se passait.
Philippe en profitait pour faire le scratch devant Rivet, Poincelet et Pachiaudi qui encaissait à nouveau dix secondes.
Cela méritait une explication car 20" en deux spéciales cela faisait beaucoup, bien que le son émis par le moteur Porsche ne laissait guère planer de doute.


Sargeant, un British qui va plutôt bien. 4° pour sa première participation, no comment!

En fait, une entretoise, faisant la liaison entre culbuteur et soupapes était cassée condamnant un cylindre au repos forcé.
Après une réparation de fortune tout rentrait dans l'ordre pour l'ES 3, plus «tortueuse» que les précédentes dans laquelle
Desjouis se mettait en exergue devant Pachiaudi à 13" qui pouvait être rassuré,
Poincelet et Sargeant qui commençait à prendre le rythme et venait taquiner le buggy SPDO pour la suprématie en groupe 5
puisque les frères Poincelet ont repassé leur auto en 2 RM. Et Philippe me direz-vous?
Il ne pointait qu'en 14e position après avoir effectué trois tout droit qui le pénalisaient lourdement lui faisant concéder 17" d'un seul coup sur son principal rival.
Au parc de regroupement avant d'entamer la boucle de nuit Rivet occupait la tête avec une petite seconde d'avance sur Philippe,
quatre sur Pachiaudi et onze sur Desjouis. Cette boucle de nuit que tous abordaient avec une certaine angoisse allait s'avérer être le juge de paix pour bon nombre d'entre eux.
Philippe pour sa pait paraissait très à l'aise s'adjugeant tous les temps scratch devant Pachiaudi qui avouait avoir quelques difficultés à « envoyer» dans ces conditions
et qui perdait 18" dans l'affaire. Rivet disparaissait sur bris de joint de culasse tandis que Sargeant profitait des malheurs de Poincelet,
bras arrière cassé à l'arrivée de L'ES6, pour se placer aux avant-postes. Ainsi à l'issue de cette première étape, le bilan était le suivant:
Philippe menait les débats devant Pachiaudi à 21" mais cet écart était tout à fait relatif car l'on avait vu que de jour, celui-ci était tout à fait dans le coup et pouvait refaire ce handicap.
Desjouis occupait la troisième à 1 '30 devant Poincelet qui avait préservé l'avantage sur Sargeant.
Le groupe 4 était mené par Raulet poursuivi comme à l'accoutumée par Hardy, alors que Pluchard (205 GTi) s'était déjà mis hors de portée de ses adversaires
occupant par ailleurs une excellente 22e place scratch. Louis (Toyota) devançait Berges en groupe 2 et Guesdon (Opel) tenait le commandement en Gr 1.

Pachiaudi, journée à l'agonie, nuit agitée ....

Depuis le départ du rallye , avant même la première spéciale un culbuteur rendait l'âme, le Porsche tournait sur 5 cylindres pendant deux spéciales.
Une réparation de fortune remédiait au mal.
Le Savoyard se voyait déjà dans les choux, estimait perdre une vingtaine de secondes dans l'histoire.
Et comme une mauvaise nouvelle n'arrive jamais seule, déconcentré par ses problèmes de moteur,
Yves commettait une petite erreur d'appréciation de terrain: lors du tour de nuit, il ne changeait pas ses pneus , pensant que le terrain pouvait devenir humide, ce qui avec le gel ne fut pas le cas.
Philippe, équipé de Michelin M4, en remettait une couche.
Tous les regards étaient tournés vers les deux virtuels champions de France. Le dimanche matin Philippe commençait sa journée avec 21 secondes sur Pachiaudi qui allait retrouver un moteur tournant à plein régime grâce à un aller/ retour dans la nuit à Paris pour changer le spièces défectueuses, courage d'espérance de son équipe jamais prête à abdiquer.


Schaal. Attaque à outrance en 4x4

Cœurs sensibles s'abstenir...

117 concurrents sortaient du parc dimanche matin pour affronter de nouveau le froid et entre autre le verglas
qui s'était délicatement et sournoisement déposé durant la nuit sur les pistes des
deux premiers chronos de la journée.
Le mano à mano des hommes de tête reprenait et Pachiaudi était le plus vite en action devant Philippe à 5" Hurel et Sargeant.
Temps ex aequo dans le secteur suivant pour les principaux protagonistes, Sargeant de plus en plus incisif complétant le tiercé.
Il le prouvera d'ailleurs dans les Moulinards (EC9) en réalisant le meilleur temps devant Philippe et Pachiaudi encore à égalité.
Venaient ensuite Desjouis et Severin qui entamait une belle remontée. Cette première boucle du dimanche n'avait donc apporté peu de changements au classement
si ce n'est dans le groupe 5 où le britannique venait de prendre la tête et la 3e place scratch avec 20" d'avance sur Poincelet.

Pachiaudi sans doute pressé d'aller déjeuner partait le couteau entre les dents pour le tour disputé en fin de matinée et s'imposait à trois reprises à son rival
qui dans l'affaire perdait 12" et ne possédait plus qu'un pécule de 4" avant d'attaquer l'étape finale.
Dans ce passage, Desjouis avait jeté l'éponge sur problèmes mécaniques. L'étape finale se disputait sur le tracé de la spéciale 2 empruntéeen sens inverse.
Philippe remettait un peu la pression sur Pachiaudi en s'imposant pour deux secondes ce qui portait son avantage à 6.
Pachiaudi commençait à douter tandis que dans le clan Phil's car on ne criait pas encore victoire, tout à fait conscient du potentiel de l'adversaire.
Et ils avaient raison! car les temps allaient descendre de manière vertigineuse, et Pachiaudi réduisait à néant l'écart le séparant du leader, à l'issue du second passage!
Après onze manches de championnat et des centaines de kilomètres de spéciales disputées, le match était nul.
C'est sur les huit derniers km de la saison que le titre allait se jouer.


Superbe « jump » de Ballandonne qui excella pendant tout le rallye à cet exercice,


C'était le délire dans les chaumières, le speaker s'égosillait

A ma droite, Pachiaudi, installé dans son Buggy, hyper concentré, à ma gauche, Philippe qui digérait malle coup que venait de lui asséner son adversaire;
« il fallait s'attendre à ce qu'il réagisse, maintenant le doute a changé de camp ».
Quelque soit l'issue de cette épreuve, il restera de toute façon l'image de ces deux champions car se concentrer et ne pas faire d'erreur avec un tel poids sur les épaules c'est déjà un exploit. Philippe s'élance en premier, l'attaque maximum dès les premiers mètres, 30" plus tard c'est au tour de Pachiaudi, encore.
plus «banzai» que son prédécesseur, verdict cinq minutes plus tard: Philippe 5'04", Pachiaudi 5'06". Les jeux étaient faits.
Pachiaudi se demandera longtemps où il a pu perdre du temps, mais en tout cas merci Messieurs pour cette finale absolument fabuleuse.
En marge de ce duel, la victoire en groupe 5 a elle aussi été fort disputée, Poincelet reprenait dix secondes à son adversaire dans cette phase finale ce qui n'était pas suffisant
mais le britannique qui eut quelques difficultés avec les CH tout au long du weekend se voyait pénalisé et perdait ainsi le bénéfice de la victoire et la troisième marche du podium.
Severin qui avait continué son forcing prenait la 5· place de peu devant Hurel.
En groupe 4, Raulet s'imposait confirmant sa 48 place au Championnat devant Hardy et Lansac qui s'adjugeait à cette occasion le Challenge Lada.
Dans le groupe 3, Pluchard qui partageait le volant avec son navigo était éliminé sur sortie de route alors qu'il occupait largement la tête
laissant ainsi la victoire à Picot (Peugeot 205) devant Malherbe avec une monture identique.
Le groupe 2 revenait à Louis devant le Mitsubishi de Berges tandis que Guesdon s'adjugeait largement le groupe 1.

Fiche technique

16' édition, les 25 et 26 novembre 1989. Organisé par l'ASA Automobile Club Andrésien. Compte pour le Championnat de France des Rallyes TT (12' manchel, les Championnats des Ligues de Normandie et d'Ile de France et le Challenge Lada. Parcours de 140,5 km dont 124,500 chronométrés.
Départ: le samedi 25 à 10 h d'Evreux. Arrivée: le dimanche 26 à partir de 17 h 30. Engagés: 165. Partants: 158. Clas· sés: 89. Conditions météo: temps ensoleillé et très froid, verglas le dimanche matin. Palmarès: 88 : Briavoine/Patat (Phil's car)· 87 : Philippe/ Rovaldieri (phil's car)· 86 : Rou· get/Bouhours (Phil's car).



course de toute beauté dePoincelet qui accède au podium ....à l'énergie



Pachiaudi : il n'aura lâché le morceau que dans la dernière spéciale. A voir en 90

 

Document trouvé sur l'épreuve grâce à R. Tersier (liste engagés, articles) :
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