Yves
PACHIAUDI....LE MONTAGNARD (s. Roux)
Avec cinq victoires aux Cimes, ce savoyard reste le roi des rallyes
tout-terrain même si, aujourd'hui, sa philosophie de la course
évolue. Adepte des buggies quatre roues motrices, il veut désormais
vivre sa passion sans contrainte ... (interview en 1986)
En annonçant que j'allais rencontrer,pour
une interview, Yves Pachiaudi, un bon nombre de spécialistes
des rallyes tout-terrain m'avaient mis en garde :« Tu verras,
il est impossible de le faire parler, il est bourru ». Inutile
de vous préciser que c'est sur la pointe des pieds et avec la
crainte de devoir remplir des pages blanches, que j'ai abordé
Yves pour notre première rencontre. Prêt à tout
pour le faire parler, je me suis retrouvé en face d'un homme
très disponible, plutôt sympa et surtout pas avare en paroles.
En citant votre nom, on pense immédiatement
à la montagne et aux courses tout terrain.
C'est vrai et cela parait normal puisque je cours depuis 1969 en tout-terrain.
La montagne et moi, c'est presque une histoire d'amour.
Mais alors, comment devient-on un amoureux de
la montagne ?
A l'époque où je disputais des courses en formule
Vee, j'avais également une VW Coccinelle avec laquelle je me
baladais régulièrement en montagne. Je crois qu'avec elle,
j'ai vraiment découvert ce qu'était le pilotage en tout-terrain.
Evidemment en étant né à Aixles-Bains, j'ai toujours
eu la montagne comme Il cadre de. vie. Dès mon enfance, j'ai
pu en profiter en effectuant des balades à pieds et je dois reconnaÎtre
que pour moi, rien ne remplace la montagne aujourd'hui.
Pourtant, vous avez commencé par le circuit.
C'est vrai, j'ai débuté en 1965 en disputant un trophée
de formule Vee. Le règlement nous obligeait à disputer
en alternance, des courses sur circuits et des courses de côte.
Mais le tout-terrain a pris le pas...
Oui, effectivement. Après avoir roulé très longtemps
avec ma Coccinelle, j'ai voulu la modifier pour la rendre plus efficace.
On a coupé le châssis, effectué des renforts et
puis finalement en 1969, on a fabriqué le premier buggy. Avec
cet engin j'ai réellement découvert le pilotage tout-terrain
et lorsqu'en 1970, la première course a été organisée,
le rallye de Megève, je crois, je m'y suis engagé. Depuis
je suis resté fidèle au tout-terrain.
Vous viviez déjà du tout-terrain
?
Oh non! D'ailleurs aujourd'hui, je n'en vis toujours pas. En
1968, je me suis spécialisé dans la Coccinelle et pendant
près de 15 ans, mon garage a vécu à l'heure de
VW. Aujourd'hui, je suis concessionnaire Seat et Santana à Chambery.
En tout-terrain, il vaut mieux éviter d'attendre les primes et
les prix d'arrivée pour vivre sinon, on termine à la cloche...
On ne court pas pour l'argent en T. T.
d'ailleurs, c'est bien simple, il n'yen a pas!
Pourtant, vous possédez l'un des plus
beaux palmarès.
J'ai effectivement enlevé deux titres de champion de France (1984
et 1985) et (ai remporté à cinq reprises le Rallye des
CÎmes et je ne suis toujours pas milliardaire...
Vous êtes le recordman des victoires sur
cette épreuve ?
Oui, et pour un bon moment je crois.
il apparaît
que vous êtes plus à l'aise sur les épreuves de
montagne que sur celles de plaine.
En fait, dès que ça monte, je suis à l'aise. Le
pilotage en montagne me convient parfaitement. A l'inverse, dans les
rallyes en plaines, je suis moins rapide. Je n'aime pas le plat! De
toute manière je viens sur toutes les épreuves car mon
principal plaisir est le pilotage en tout-terrain. J'essaye de faire
abstraction de mes préférences et d'aller aussi vite sur
tous les terrains et si je réussis à gagner en plaine,
(éprouve un réel plaisir car cela prouve que je peux m'adapter.
A travers une aussi longue carrière, quels
ont été vos meilleurs souvenirs ?
Je suis à la fois pilote et constructeur, et mon plus
grand plaisir est de pouvoir gagner des courses avec mes propres buggies.
Courir pour les autres sur des châssis qui ne sont pas de ma fabrication,
ça ne m'intéresse pas!
Mon but et ma seule motivation, c'est de pouvoir faire évoluer
une voiture que j'ai moi même construit.
En dehors de la construction et du pilotage, j'aime également
organiser des épreuves toutterrain comme le rallye du Haut-Bugey
dont cette année nous avons fêté la 128 édition.
J'adore aller découvrir de nouvelles pistes, ou encore aider
des organisateurs à créer des épreuves.
La course est avant tout une succession de bons souvenirs et c'est vrai
que mes cinq victoires aux Cimes sont pour moi une grande satisfaction
mais avant tout ma joie est de pouvoir courir dans cette spécialité
que sont les rallyes TT.
Pourquoi êtes-vous cloisonné uniquement
dans les rallyes tout-terrain et ne vous essayez-vous pas dans d'autres
domaines ?
Non, je veux uniquement conduire la voiture que j'ai construit
et dans les épreuves que j'aime. Faire autre chose ne m'intéresse
pas!
Pour gagner une course, il faut se sentir bien et je ne me sens bien
qu'en rallye TT uniquement et si par bonheur ce rallye est en montagne,
alors je suis le plus heureux des hommes.
Il semble à vous entendre qu'il existe
un monde entre les épreuves de plaine et celles de montagne.
Oui, bien sûr. Un engin qui est conçu pour la montagne
sera forcément moins rapide en plaine et vice versa. Pour parler
de mon buggy, il a été pensé pour vaincre en montagne
et c'est vrai qu'il est moins à l'aise sur les tracés
rapides en plaine.
Vous avez été le premier à
vous essayer en quatre roues motrices ?
Effectivement en 1977, j'ai adapté une transmission 4
x 4 à mon buggy pour aller faire les Cimes. Le samedi soir, à
l'issue de la première étape, j'avais près d'une
minute d'avance sur tout le monde! L'engin était fantastique
en montée. Trois semaines plus tard, je suis allé en Normandie
au rallye Plaines et Vallées, et là, j'étais largué!
Le buggy au-delà de 80 km/h ne tenait plus la route, c'était
effroyable ! En franchissement il était imbattable. Ne voulant
pas perdre trop de temps à le mettre au point, je suis revenu
aux 2 roues motrices. J'ai ainsi fait trois saisons et après
avoir cassé une multitude de transmissions, je me suis de nouveau
penché sur le problème du 4 x 4. Avec l'augmentation des
puissances, il était préférable de passer celle-ci
sur les 4 roues motrices pour la fiabilité. En reprenant les
bases du premier buggy 4 x 4, je l'ai considérablement modifié
et petit à petit, nous l'avons amélioré pour finalement
obtenir un buggy qui tient bien la route et qui est incassable.
Depuis vous êtes un adepte de la transmission
4x4.
Oui bien sûr, je me suis aperçu que durant l'intégralité
du Championnat, il arrivait que sur certains terrains (très rapides)
le 4 roues motrices était toujours handicapé mais qu'au
bout du compte, il restait un engin très performant sur la quasi-totalité
des tracés.
Quel est son principal défaut ?
C'est un engin qui, en plaine, se comporte super bien sauf peut-être
lorsque cela va très très vite en ligne droite avec des
sauts et aussi dans des enfilades serrées. Dans les épingles,
il souffre également d'un sous-virage important. En revanche,
il possède une motricité quasi-parfaite et une tenue de
route excellente. On a toujours l'impression d'être sur des rails
et en plus en parfaite sécurité. Son freinage est supérieur
aux 2 roues motrices et naturellement sur des terrains humides, il est
imbattable.. .
Parlons maintenant de Pachiaudi. Quelles sont
vos qualités au volant ?
Connaissant parfaitement le buggy, je sais exactement comment
le piloter. De ce fait je ne suis pas brutal.
J'ai des clients qui vont beaucoup plus vite que moi, mais beaucoup
moins longtemps. Je suis plus agile que rapide, car j'aime les parcours
sinueux, les tracés rapides me correspondent moins bien.
Et vos défauts ?
Parfois, je suis trop prudent et je perds du temps!
Vous n'avez pas participé cette année
à l'intégralité du championnat, pourquoi ?
Voilà trois saisons que je cours le championnat et j'en
ai marre! C'est très dur de participer à l'intégralité
des épreuves. En dehors des rallyes, je suis obligé de
faire marcher mon garage et en général, pour les rallyes,
il faut que je parte 3 jours au minimum et pendant ce temps-là,
je ne travaille pas. De surcroit, je suis obligé de préparer
la voiture la semaine, bref, c'est très dur. Cette saison je
fais une course sur deux, sans viser le titre et simplement pour me
faire plaisir.
Le championnat et le titre ce n'est plus mon truc, je préfère
m'abstenir de courir après les points et attaquer quand je le
veux sans arrière-pensée... Pour être franc, je
me suis fait une meilleure réputation en gagnant les Cimes plutôt
que le championnat.
Gagner le championnat ne rapporte rien hormis de faire plaisir à
vos amis et à vous même.
. Yves Pachiaudi .Né à Aix-les-Bains (Savoie) 1e.19mars
1f)41 Marié, 1 enfant court depuis1965 :5 victoires au Rallye
des Cimes 2 titres de Champion de France 84/85.
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