HAUT BUGEY
1990
Texte Eric Cowez Photos Robert Ollivier
La météo est plutôt au beau fixe, pourtant il y a un
homme qui n'arrête pas d'effectuer des allers et retours. Sur son visage
fermé, on peut y lire une certaine angoisse.
Cet homme s'appelle Yves Pachiaudi et c'est l'organisateur : véritable
homme orchestre, ici il est chez lui, et c'est son rallye, il fait tout. On
le sent un peu tendu, normal !
Ce perfectionniste a consacré une bonne partie de sa vie au tout terrain
et redoute en permanence le moindre incident...
De plus, ce weekend, il courra et devra impérativement bien se classer
devant son public et ses sponsors. Mais ça, à la limite, c'est
secondaire !
Si depuis deux ans la grande majorité des rallyes TT a atteint ou dépassé
largement les 100 concurrents,
le Bugey a connu cette année une sévère défection
: les causes, tout d'abord l'absence de certains concurrents engagés
à l'Atlas (Eric Briavoine, Desjouis...),
quelques-uns pour des raisons personnelles boudant l'épreuve (Philippe),
pour les autres c'est le mystère. Verdict: 65 engagés. Aïe!
Une désagréable surprise pour Pachiaudi qui ne comprend toujours
pas les raisons de cette situation.
Pourtant le Rallye TI du Haut-Bugey a bien du charme: chaque année
l'organisateur y apporte des petites innovations pour le rendre plus attrayant.
Cette année, l'épreuve reprenait les mêmes spéciales
qu'en 89 avec un départ sur la place de Belley. Seules innovations:
un tour de plus le samedi et la spéciale de la carrière à
Hauteville.
Sur les 65 engagés, on avait vite fait le tour des favoris. Pachiaudi
serait joué pratiquement à 1 contre 1, derrière nous
retrouvons le vainqueur de l'année dernière Calzavara
(en pleine mise au point avec son nouveau Fouquet), Turon-Barrère (à
la poursuite de sa première victoire), Ardurats,
et l'autre régional de l'étape, le préretraité
Lay, avec son fringant moteur de T 16. Parmi les outsiders, on pensait évidemment
à Clévenot, Gaffuri, Alessandria, Herbert...
Sans oublier les top-riders des buggies 4 x 2 : Poincelet, Burnet, Bonfils,
Cosson...
Dans les groupes des véhicules 4 x 4 de série (cat. 2) ils n'étaient
que cinq dont le leader Ryckeboer, blanchi de son injuste réclamation
du Labourd.
Les Mitsubishi et autres Cherokee n'ont pas jugé bon de faire le déplacement...
Dommage pour le spectacle. En groupe 4, Rouch (Lada) et Courouau (Land) partaient
favoris.
A noter le surclassement du Rocky de Gilles Nantet en groupe 6 (pour un pare-chocs
soit disant non règlementaire).
Il faut savoir que cette auto a couru plusieurs courses dans cette configuration
sans connaître le moindre souci.
Les commissaires auraient simplement dû marquer ce détail sur
le passeport technique pour que la modification soit effectuée lors
de la course suivante.
Mais voilà, on applique à tel endroit un type de mesures et
ailleurs on légifère différemment, deux poids, deux mesures.
Comment le pauvre débutant peut-il s'y retrouver lorsque les spécialistes
s'emmêlent les pinceaux ?
Le Savoyard a bien essayé de retrouver son groupe, peine perdue, il
restera en groupe 6 avec les buggies.
Mais il lui en fallait plus pour le décourager avec ses 110 chevaux,
il se fera un point d'honneur d'être devant.
Venu en véritable touriste, un benne en guise de porte-auto, et simplement
quatre. roues de rechange, un casque, une combinaison, des gants... et le
tour était joué.
Mais pas de caisse à outils et pas de copilote. Qu'importe, il trouvait
sur place un petit jeune passionné de rallye, qui avait en tout et
pour tout une seule course à son actif... et c'était parti !
Yves Pachiaudi, l'homme à tout faire du Haut-Bugey...
Plateau pauvre certes, mais un tracé très intéressant
qui allait vite faire oublier le nombre de concurrents.
Amputée de ses deux leaders provisoires au championnat, cette troisième
manche pouvait difficilement échapper à« l'homme à
tout faire» du Haut-Bugey,
le pilote constructeur-organisateur Yves Pachiaudi, qui avait décidément
bien du pain sur la planche, et comme attendu, il s'élançait
comme une balle dès le prologue.
A peine sorti de son bacquet à l'arrivée des spéciales,
l'homme se ruait en salle du P.C. course, tentant de régler quelque
problème d'intendance ou d'organisation,
en ressortait aussitôt pour donner une indication à un commissaire
«débordé» et s'enquérir du bon déroulement
de l'épreuve, avant de s'apercevoir qu'il était temps de repartir
à "assaut de la spéciale suivante...
Dynamique, le garçon!
Et la course dans tout cela? « Ça va bien merci!»
Dès le prologue, on assistait à une grosse bourre à trois
: Yves Pachiaudi, et Patrick Calzavara se retrouvaient ex aequo devant un
étonnant Patrick Poincelet.
Les deux compères récidivaient dans la première spéciale
du samedi après-midi, reléguant le maître des lieux à
13", Lay suivant à une encablure.
En groupe 4 les Lada s'expliquaient ferme avec Alain Derognat et Michel Rouch
(33 et 34e). Le premier prenait la tête du groupe pour 1".
Alain Ryckeboer s'adjugeait sans trop de mal le commandement des véhicules
de série avec une 38e place.
Derognat, ici sur le toit
Un tantinet énervé de se sentir devancé, Yves Pachiaudi
remportait trois scratches d'affilée, devant tout d'abord un Poincelet
toujours très accrocheur,
ensuite devant Calzavara et finalement devant Lay.
Derrière, Herbert et son superbe Rivet jaune accumulaient les 3e et
4e places. Un peu plus loin, Burnet faisait le ménage en deux roues
motrices,
mais à une bonne longueur des frères Poincelet. Rouch avec son
petit Lada, de son côté, continuait un cavalier seul en groupe
4 en devançant six fois son principal adversaire,
le Land Rover de Courouau. Sans compter le festival de Gilles Nantet qui prenait
sept fois le meilleur sur les vainqueurs du groupe 4, en se classant entre
4-8 places devant.
lmiparable, un coup de volant magistral! De son côté, Ryckeboer
avec son Land groupe 2, mais plus puissant que le Daihatsu, essayait de rivaliser
avec le Savoyard, et s'en approchait à plusieurs reprises.
Dans la catégorie des véhicules de série, on remarquait
la bonne prestation d'Alain Thomas, leader du Challenge Lada, et du Suisse
Bandieri (Toy diesel).
Patrick Calzavara (Fouquet 4X4), vainqueur de cette manche l'an dernier,
n'avait en effet aucunement l'intention de céder son titre
sans combattre et avait à cœur de prouver que son succès
de 89 n'était pas dû au hasard.
De fait, il prenait la tête du classement dès la première
spéciale et ne la lâcha plus...jusqu'à son abandon dans
la quatrième EC, tendeur de pompe à eau cassé.
Autre homme fort de ce début de course, l'excellent Patrick Poincelet
pointait les deux roues motrices de son buggy SPDO à la seconde place
scratch durant les deux premières EC.
Il n'eut pas davantage le loisir de confirmer sa grande forme puisqu'un cardan
supportant mal la puissance accrue de son nouveau moteur, le 6 cylindres 2,5
1 de l'Alfa 164, devait céder.
Patrick Poincelet, époustouflant d'aisance malgré
seulement 2 roues motrices, fut rapidement contraint à l'abandon,
l'hécatombe
Après les abandons prématurés de Poincelet et Calzavara,
les scratches se sont partagés entre Lay (2), Lignac (2) et Pachiaudi
(1).
Egalement victime de ce début d'épreuve, Philippe Cosson heurtait
une souche d'arbre dans la première spéciale
et laissait sa seconde place du groupe 5 à Alain Burnet qui abandonnera
également un peu plus tard.
Dès lors, Pachiaudi prenait les rênes de « son» épreuve
et n'allait plus être inquiété.
Son suivant immédiat, Daniel Lay, au volant de son proto maison en
groupe 6,
accusait déjà un retard considérable de 46" qu'il
ne parvint pas à réduire malgré deux spéciales
emportées de fort belle manière.
Mais dame fortune ne semblait guère disposée à sourire
aux contestataires du maître des lieux et ce nouveau challenger fut
lui-même bientôt contraint à l'abandon: biellette
et rotule de direction n'en firent qu'à leur tête dans la 8ème
EC et finirent par déclarer forfait dans l'ultime épreuve de
la première journée.
Très à l'aise dans l'orage et sous la violente pluie de cette
fin d'après-midi, Jacky Lignac signait les deux derniers scratches
et rentrait au parc fermé en seconde position,
son Fouquet précédant le Rivet de« l'autre ».Jacky
(Herbert), finissait son samedi de façon étourdissante, résultat:
une belle troisième place le soir du premier jour lui même
suivi d'Ardurats, de Turon-Barrère et d'Auzeau.
Leader du groupe 5 après les abandons successifs de Poincelet, Cosson
ou encore Burnet, Michel Bonfils enlevait la septième place,
tandis que son homologue en groupe 2, Alain Ryckeboer, menait une course sans
encombre et, cette fois, sans contestation... (voir encadré).
Le samedi soir, Yves Pachiaudi se retrouvait sans la moindre surprise en tête
du rallye, avec près d'une minute d'avance sur Lignac.
Herbert concrétisait sa superbe course avec une troisième place
devant un Ardurats pas assez incisif: «C'est la première fois
que je viens ici et je n'ai pas reconnu....»
Turon-Barrère échouait à la cinquième place devant
un petit nouveau, Eric Auzeau (ex-Bab Buggy), ce pilote du Puy de Dôme
a racheté le buggy de Nickrass
et apparemment côté attaque, ça ne va pas mal. Bonfils
sur l'ex-Strakit de Nantet a pris la pôle des deux roues motrices après
les ennuis de Burnet.
En groupe 4, Rouch a réussi à maintenir à courte distance
(8") le Land de Courouau. Mais tous les deux se font taper par Nantet,
18e, et Ryckeboer (1ge), 1er du groupe 2.
Derrière, gros baston et 1" d'écart entre les deux Ladaïstes
Thomas et Delorme.
Michel Uhart et son proto« maison', sans doute l'auteur
de la« perf' du jour».
PACHIAUDI...
prophète à la maison
Changement de décor le dimanche où le rallye délaissait
les environs de Belley pour s'élever du côté de Thézillieu
et de Hauteville, la bien nommée.
Décidément bien revenu à la compétition après
une année d'absence due à des problèmes de dos,deuxième
au général, "ça ne pouvait pas en rester là"
pensa Lignac.
Il décidait donc d'attaquer le leader. Si dans la première spéciale
cela se passait plutôt bien - il réalisait le scratch et , reprenait
déjà 20" sur les 56" -
il frôlait la catastrophe en heurtant un rocher dans la deuxième
et crevait. Cette crevaison l'obligeait à parcourir les deux tiers
de la spéciale pneu avant gauche out.
Résultat, évidemment, une perte de temps, mais surtout un déréglage
de la direction. l'auto n'était plus vraiment stable,
Jacky dû se contenter d'assurer dans les dernières spéciales
car le buggy ne tenait plus la route. «Dans la rosée de ce petit
matin printanier»...
Lapert et son bon gros buggy diesel réussissaient un excellent 3e temps
devant Clévenot et Turon-Barrère ... avant d'aller pour ce dernier
grossir les rangs des abandons dès l'EC suivante.
Décidemment, une série inabituelle d'abandons chez les outsiders.
Autre bonne surprise : Herbert très en verve finit troisième
devant Ardurats et le Basque Uhart bien revenu.
De son côté, Bonfils confirmait sa victoire en groupe 5 avec
son Strakit.
Lapert dut cravacher son Phil's Bug à moteur de 505
Turbo-Diesel pour l'amener à la 8' place scratch.
Malgré son attaque, Rouch (Lada) se faisait finalement passer par le
Land de Courouau et la victoire en groupe 4 devait finalement revenir à
ce dernier.
D'autant que le vaillant pilote Lada commettait une faute dans une épingle,
l'obligeant à passer la marche arrière, les 7" de différence
à l'arrivée étaient certainement là.
En tout cas, le petit électricien possède déjà
une bien belle attaque. Sans son déclassement, la catégorie
4 aurait dû revenir à Nantet (11e),
malgré une crevaison le dimanche et le remplacement de roue par une
plus petite.
Ryckeboer effectuait une fin de course phénoménale pour essayer
d'aller chercher Nantet... comme ça, pour le plaisir.
Mais le Savoyard n'èst pas un «mec facile» et son avance
était trop importante ! Le Land finissait juste derrière (Ile)
à 1'39.
Alain Thomas, régulier, finissait à la deuxième place
des véhicules de série et confortait par là même
sort capital au Challenge. Bien vu !
Et le premier, me direz-vous. Pas de surprise. Yves Pachiaudi remporta les
trois dernières spéciales du dimanche et s'adjugeait haut la
main son épreuve... sans trop forcer.
Lignac réussit ici une superbe course, et démontre qu'il n'a
pas perdu la main.
Après les abandons successifs des principaux leaders
en groupe 5, la course régulière du Michel Bonfils lui a permis
de s'imposer.
Mais Yves Pachiaudi a prouvé que l'on pouvait organiser une belle épreuve
dans cette superbe' région.
C'est vraiment dommage que les amoureux du tout terrain ne l'aient pas suivi.
Pour 91, vous n'aurez plus d'excuses.
En conclusion, on peut dire que l'épreuve s'est déroulée
formidablement bien, et les absents ont bien sûr manqué.
Herbert sur son Rivet a vraiment ..envoyé..
pendant ces deux Jours. Le résultat de cette ..crise.., une étonnante
troisième place.
Fiche technique
18' édition les 5 et 6 mai 90, Organisée par l'ASACdu Rhône
. avec le concours du Club Bugiste 4X4 et d'Yves Pachiaudi.
Comptant pour le championnat de France des rallyes TT (3' manche), le championnat
de la ligue Rhône-Alpes et le Challenge Lada. Parcours: samedi, départ
de Belley (01) pour 3 boucles de 3 EC.
Dimanche: départ de Belley pour 2 boucles de 2 EC. Kilométrage:
190 km dont 1 03 d'ECo Météo: temps couvert et orageux. Partants:
64. Classés: 29, Palmarès:
19B9: Calzavara-Bordas, 1988: Briavoine·Patat. 1987:
Nautet·Lessage. 1986 et 85 : Pachiaudi-Chardin, etc
Second Lada à l'arrivée et 2' du groupe 2 pour
Alain « Poulidor, Thomas!
Les classements
Scratch après la 1 ère étape
l, Pachiaudi-Chardin (Pachiaudi) 48'40" (1" groupe 6)- 2, Lignac-Bos
(Fouquet) 49'36" - 3, Herbert-Baudin (Buggy Rivet) 49'40" - 4, Ardurats-Bielle
(Fouquet4X4) 50" 9" -
5, Turon-Barrere-Moitet (Buggy Rivet) 50'29" - 6, Auzeau-Auzeau (Phil's
Car) 50'44" - 7, Bontils-Carle (Strakit) 51'34" (1" groupe
5) - 8, Uhart-Aria (Uhart Proto) 51 '37" -
9, Lapert-Guyon (Phil's Bug) 51'46" - 10, Clevenot-Brau (Fouquet) 51'47"",
19, RyckeboerDannenmuller (Land Rover) 57'47" (1" groupe 2) - 20,
RouchBalluriaud (Lada) 57'54" (1 er groupe 4), etc,
Scratch
l, Pachiaudi-Chardin 1 h38'54" (1" groupe 6) - 2, Lignac-Bos 1
h41 '36" - 3, Herbert-Baudin 1 h42'48" - 4. Ardurats-Bielle 1 h44'20"
- 5, Uhart-Aria 1 h46'34" -
6. Gaffuri-Favrot (Phil's Car) 1 h47'13" -7, Bontils-Carle lh48'32"
(1" groupe 5) - 8. Lapert-Guyon 1 h50'16" - 9. Michallet-Michallet
(Michallet 4X4) 1 h51'41 " - 10.
Lebeaud-Lebeaud (Lada Proto) 1 h55'03" - 11. Nantet-Mochan (Daihatsu
Rocky) 1 h56'12" - 1 2, Ryckeboer-Dannenmuller 1 h58'35" (1"
groupe 2)-13. Perreau-Giraud(Fouquetl 1 h58'44"
-14. Courouau-Bossart (Land Rover) 2h00'07 {1" groupe4)-15.Salin-Salin
(Salin)2h00'14" -16. Rouch-Balluriaud 2h00'14" -17.
Auzeau-Auzeau 2h00'59" - 1 8. Lottaz-Gaulier (Punch)2h0l '07" -19.
Beziat-Bisinger (Toyota) 2h05'53" . 20. Bruyère-Genly (Pachiaudi)
2h07'01" -
21. Thomas-Vazeilles (Lada) 2'07'22" - 22.Roman-Gillier (Land Rover)
2h07'37" - 23. Costes-Terrisse (Cournil V6) 2h09'54" - 24. Bandieri-Bandieri
(Toyota) 2h14'42" -
25. Carrel-Bon (Buggy Rivet) 2h 18'16" - 26. Delorme-Porte (Lada) 2h22'57"
- 27. Pellet-Perrache (Lada) 2h24'1 8" - 28. Dos SantosBonnet (Lada)
3h20'35" - 29. Touron-Fernandez (Strakit) 3h22'32".