BEAUX MONTS 1990
texte, J. F. Lanoiselée Photos H, Laroche et Yvonnick


Le roi Philippe tient de boue

Inscrite en championnat de France l'année dernière pour la première fois, Beaux Monts en était donc à sa deuxième édition.
Cette 7e édition du Rallye cher à P. Soenen et son équipe de l'ASA des Beaux Monts restera longtemps dans les souvenirs.
A Saint-Just-en-Chaussée, l'hiver était arrivé avec quelques jours d'avance. Ambiance grise, fraîche et humide de rigueur.
Vision étrange et apocalyptique que ces autos affrontant un univers de boue liquide, d'eau gluante, transformant des spéciales réputées rapides par temps sec en véritable parcours du combattant;
vision mêlée d'effarement et d'admiration que ces équipages transformés en « zombies », le corps et le visage maculés d'une boue grisâtre
d'où n'émergent plus que des yeux rougis par le froid et la fatigue. Mais qu'est-ce qui les a donc poussés à aller au bout de cet enfer ?
La passion du sport automobile qu'ils pratiquent, la passion tout simplement...

Qui pourra arrêter Pierre Philippe ??

Le samedi en fin de matinée, 96 concurrents prennent connaissance du parcours légèrement remanié par rapport à celui de l'édition 89. Pour ce faire, les organisateurs ont rectifié le tir.
Jugée par la majorité des pilotes comme trop rapide, ils ont installé des chicanes, afin de réduire les vitesses trop élevées en lignes droites: une très bonne initiative !!!
C'est ainsi que l'accueil des concurrents est unanime après les reconnaissances pédestres et à VTT : ce parcours est beau, bien dosé, très technique, disons plus tout terrain !
Un parcours à la hauteur de Pierre Philippe, le champion 90 déjà couronné, et de ses prétendants à la place du dauphin, Briavoine, Herbert et Calzavara.
Justement, question enjeu, le titre étant déjà attribué à Philippe depuis Dunes et Marais, seul les deuxième, troisième et quatrième places n'étaient pas encore définitives.
De même, le challenge des 4 x 4 de série était lui aussi loin d'être joué, nous le verrons plus loin.

Vu la météo, il était clair que les buggies deux roues motrices habituellement véloces sur ce tracé, allaient souffrir.
Une situation qui ne déplaisait pas aux leaders de la catégorie.
Philippe, très en verve, s'adjugeait le prologue avec déjà 4" d'avance sur Herbert et 9 sur Calzavara. Briavoine est 7e à 13" alors que pour Lapert, en panne d'injection,
c'est un déficit de 2' et une 69ème place au départ qu'il faudra assumer! L'occasion d'une superbe remontée vers la 8e place le dimanche soir...
Mais n'anticipons pas, tellement la course sera passionnante sur les 2 jours..

Dans la 1ère boucle, fidèle à son esprit d'attaquant, Calzavara ripostait en s'adjugeant les 3 premiers chronos. Il prend la tête de la meute engluée dans la boue pour certains.
Second à la grande surprise des connaisseurs, Fimbel, Strakit (4 x 2), qui profitait d'un terrain pas encore tout à fait détrempé. Derrière, Philippe guettait.
De son côté, Eric Briavoine rodait un nouveau moteur de chez Techniprofil. Après un sixième temps au prologue et des places de 4e et 5e,
il essayait de remonter à la régulière tout au long de la première boucle. Puis Réaction immédiate de Philippe, la 2e boucle le voyant en tête avec 12" d'avance sur Calzavara.
Briavoine réalise le scratch dans l'ES6 après un départ prudent. Musset, 4ème du prologue a déjà disparu, boîte cassée;
Turon Barrère a écopé d'une pénalité de 9', Vincendeau d'une de 7', ce qui les obligera, ainsi que Lapert, à cravacher jusqu'au bout.

Calzavara à la bougie

Troisième boucle, la nuit tombe! Calzavara part pour une nuit de cauchemards. En effet pour sa première participation àcette épreuve,
il n'avait pas prévu une fin de journée en nocturne. N'ayant pas emporté avec lui de phares additionnels, il dut terminer la journée à la lueur de ces simples phares d'origine.
Avec la boue, les arbres, les longues lignes droites... ce fut fatal, lui qui avait un petit moral en début de rallye suites aux nombreuses déconvenues sur cette fin de saison.
Les deux Phil's Bug lui filaient sous le nez et Philippe lui infligeait un sérieux coup au moral avec 1'12 d'avance. Briavoine remportant même trois scratches sur les quatre dernières spéciales;
il revenait ainsi à 25 secondes du leader, Philippe.
Ces trois là ont fait le trou sur Herbert, bon 4e, Estienney menacé par Hurel pour la 5e place, et Girardin, Rivet et Varangle dans un mouchoir.
10e et leader du groupe 5, Daniel Salin prouve que son proto progresse et est dans le coup pour la gagne, devancer le rapide Bigot même de 2 petites secondes étant en soi une référence.
Entre temps Fimbel avait jeté l'éponge. En groupe 2, personne ne peut suivre le Land Rover de Ryckeboer, pas même Louis, son second, déjà à 7'.

Idem pour le groupe 4 où Courouau précède Rouch, 1 er des Lada, de 4'.
On remarque les principales disparitions de Fimbel (Starkit) qui menait en groupe 5, de Hardy (Mitsubishi) qui menait en groupe 4, et de Nantet (Suzuki Vitara) qui, suite à une lourde pénalité, préfère renoncer.
Dommage car ce nouveau groupe 2 aux mains d'un pilote expérimenté aurait pu donner du souci aux leaders du groupe.

La première journée se terminait donc en nocturne, et sur un terrain de plus en plus gras, cela promettait pour demain... Il est 18H30, 68 voitures entrent au parc,
la sympathique Coccinelle de Gérard-Da Silva ferme la marche à 63 minutes du Roi Philippe.


Hurel et son Phil'Bug ne fut jamais très loin des leaders et termine 4', devant les «valeurs sûres» que sont Rivet et Estienney notamment.

l'enfer, c'est maintenant !!!!..

Vu les écarts, et sans ennuis particuliers, P. Philippe devait se méfier de son suivant E. Briavoine placé à 25 secondes.
Il a plu, beaucoup plu toute la nuit. Les organisateurs ont modifié et raccourci la 1ère ES, une longue partie en bordure de bois étant déjà impraticable.
Et il pleut toujours. Philippe ouvre la route et creuse l'écart en même temps qu'un sillon dans la boue meurtrière pour les mécaniques.
Son plus dangereux adversaire, Briavoine, ne ressortira pas de cette 1ère boucle. Car Eric nous refait le coup de la cocotte-minute et ce dès la deuxième spéciale.
Le pilote Gemo s'apercevait qu'il y avait comme une anomalie: plus d'eau dans le vase d'expansion. Préférant encore une fois éviter le pire, E. Briavoine ( la série noire ?).
En fait, il y avait un défaut : un trou dans la fonte d'aluminium. Exit le deuxième.

Reste Calzavara mais c'est à contre-cœur et sur la volonté de son navigateur Christian Burnas que l'Aquitain continue.
Philippe, sauf ennui, a course gagnée. Le champion ne commettra aucune faute et fête son titre tout neuf par une belle victoire dans des conditions devenues infernales au fil des tours.
L'ES3, transformée en rivière est elle aussi raccourcie, de moitié, au 2e tour.
Dans la foulée, Calza avait levé le pied, Philippe trop loin, il assurait sa deuxième place, ne pouvant pas reprendre 1'30.
De plus, les pneus du Fouquet rendaient l'âme, Patrick attendit le dernier moment pour les changer, jusqu'à ce que la tenue de route devienne catastrophique.
Après leur remplacement, tout rentrait dans l'ordre puisqu'il signait cinq des six derniers chronos.
Philippe, avec encore une victoire scratch et des deuxièmes places, remportait sa cinquième épreuve de la saison avec 3'48 d'avance... facile.
Derrière, Herbert grâce à une superbe course, assure brillamment sa 3e place et la victoire en classe 2. Il accéde à la deuxième au championnat.
Eric Briavoine, après son abandon, se retrouvait donc ex aequo avec Calza à la troisième place. Chaud le baston pour le podium au Plaines et Vallées lors de la dernière manche.


Hurel, très à l'aise sur le tracé rapide, et Rivet ont fait le forcing et passent Estienney. Varangle a quant à lui gardé le contact et précède Lapert, 1 er de la classe 4,
et auteur on l'a dit de « la remontée du week-end" en se mettant encore une fois en évidence sur un terrain digne du Camel Trophy (8e).
En groupe 5, Salin s'est retiré à la fin de la 1 ere boucle,privé de freins arrière: continuer équivalait à irrémédiablement sortir et casser le beau proto.
Bigot a le champ libre et son attaque permanente lui permet d'être le seul groupe 5 dans letop 10, un groupe 5 où ce fut l'hécatombe:
36 partants, 8 à l'arrivée dont Gillot dauphin de Bigot, Souply 1 er en classe 2 et Nival 1 er en classe 1.
Turon-Barrère très véloce mais encore victime de soucis mécaniques cloturait le top 10.

En groupe 4, après l'abandon du très rapide Hardy (Pajero), un revenant, Courouau arrivait sur l'avant-scène en finissant 14e !
il termine avec plus de 7' d'avance sur Rouch, 1 er de la classe 1 et surtout 1er Lada, Leibovitch également sur Lada empochant la classe 2.
Si le championnat est joué, les deuxième et troisième places sont loin d'être acquises.


En groupe 2, Ryckeboer a vu sa victoire s'envoler dans la fumée de son moteur.
N'hésitant pas à courir dans la boue pour chercher de l'huile auprès de spectateurs bienveillants, il ne réussira malheureusement pas à sortir le Land Rover blessé de l'ES3.
La victoire est tombée alors sous les roues du Toyota de Louis qui dut toutefois ne pas se relâcher devant la menace Bandieri.
La classe 1 de ce groupe revient à Verrier sur Lada. Enfin, comment ne pas qualifier d'exploit la course accomplie par Edde-Grebonval (505) et Rabourdin-Dard (R18):
amener une berline au bout de cette galère, passer où beaucoup de 4X4 se sont enlisés irrémédiablement, cela signifie une science du pilotage en finesse très développée.
40 équipages sont allés au bout de cette grande et difficile aventure, parfois péniblement comme ce pauvre Lada de Da Silva,
à l'agonie de ses suspensions dans le dernier tour, mais au moment des longues veillées d'hiver qui arrivent,
ils pourront être fiers de raconter: « le ralIye TT des Beaux Monts 90, j'y étais! "


L'organisation de Beaux Monts a fait un réel effort pour surmonter les petits désagréments de l'année dernière,
mais l'épreuve reste encore une fois pas assez technique pour un tracé TT, même s'il est vrai qu'avec le terrain gras, on s'est rapprochés des parcours off road.
Une spéciale de plus, un petit effort et on sera dans le vrai.
Rendez-vous en 91, hors championnat.

Fiche technique

7' édition, les 27 et 28 octobre 1990, 11' manche du Championnat de France des Rallyes Tout Terrain -Organisée par l'ASA des Beaux Monts
Compte également pour le Championnat de la Ligue Nord Picardie et pour le Challenge Lada -Parcours: tour de reconnaissance d'une boucle de 33,2 kms
(3 ESI. Puis 3 boucles à parcourir. Le dimanche: 4 boucles à parcourir. Total: 265,6 kms dont 166,2 chronométrés(22 ES)-
Engagement: 1 800 F - Prix distribués : 51 660 F Météo: averses intermittentes le samedi, terrain gras;
pluie violente et incessante le dimanche, terrain boueux très difficile, inondé par endroits entraînant un raccourcissement des ES1 et 3 - 96 Partants - 40 Classés
Palmarès: 89: Pachiaudi, 88 et 87: Briavoine, 86 : Philippe.

Classements

Scratch après la 1 ere étape

1. Philippe·Girard (Phil'BugIS9'12" (1er groupe 6) 2. Briavoin~Patat(PhiI'Bug)59'3T' - 3. Calzavara-Burnas(Fouquet) 1 hOO'24"4. Herbert-Bouchet(Rivet)1 h02'01" -
5. Estienney-Estienney(Phil'Bug) 1 h03'08" - 6. Hurel-Hurel (Phil'Bug) 1 h03'2T' - 7.
Girardin-Gervais (Phil'Car) 1 h04'1 5" - 8. Rivet-Patour (Rivet) 1 h04'41" 9. Varangle-Bocquet(Phil'Bug)1 h05'04" -1 0, Salin-Salin (Salin) lhOS'SS" (1er groupe 5)
,24. Ryckeboer·Dannenmuller (Land Rover) 1 h13'24" (1 er groupe 21 ...26. CourouauBossart (Land Rover) lh14'30" (1er groupe 41 ...
42. EddeGrebonval (Peugeot SOSll h23'30" (1 er groupe 3) ",S2, LangloisLe Razavat (Samba) 1 h28'24" (1 er groupe 1), etc.

Scratch final

1. Philippe-Girard (Phil'Bug) 1 h57'16 (1 er groupe 6) 2. Calzavara-Burnas (Fouquet) 2h01 '04" - 3. Herbert-Bouchet (Rivet) 2h02'54" - 4. Hurel-Hurel (Phil'Bug) 2h05'29" -
5. Rivet-Patour (Rivet) 2h06'14" - 6. Estienney-Estienney (Phi l'Bug) 2h07'40" - 7.Varangle-Bocquet (Phil'bug) 2h07'52" -8. Lapert-Guyon (Phil'Bug) 2h08'50" -
9, Bigot-Favier (Strakit) 2h09'S4" (1 er groupe 5) 10. Turon Barrere-Moitet (Rivet) 2h11
11. Sciancalepore-Magré (Rivet) 2h12'43" - 12. Briard-Gauriault (phil'Bug) 2h1 7'38" - 13.Vincendeau-Fouladou (AVS Sadevl 2h19'5) -
14. CourouauBossart (Land Rover) 2h31'SO" (1 er groupe 4) . 15. Gillot-Monnier (PhiI'BugI2h33'44" - 16. Louis·Gindre (Toyota) 2h33'49" (1er groupe 2) - 17. Souply-Souply (proto Buggy) 2h35'15" 18.
Bandieri-Bandieri (Toyota) 2h35'2T' -19. Derouet-Bertrand (Phil'Bug) 2h37'22" - 20. Blanche-Fraizier (Strakit) 2h37'54" - 21.
Rouch-Balluriaud (Lada Niva) 2h38'41" - 22. Bouvier-Caré (Lada Niva) 2h39'4.9" - 23. Verrier-Arnaud (Lada Niva) 2h40'28" - 24.
Leibovitch-Deneux (Lada Nival 2h40'56" - 25. Thomas-Vazeilles (Lada Niva)2h45'33" - 26. Pottier-Pendic (Lada Niva) 2h46'11" 27. Verdier-Pottier (Lada Niva) 2h46'51" -
28. Merckling-Vernière (Lada Niva) 2h47'02" - 29. Deramaix-Chandelier (Lada Niva) 2h47'52" - 30. Freje-Charpentier (Lada Niva) 2h48'13" - 31. Lemire-Lamm (Lada Niva) 2h56'04" -
32. Merckling-Lamy (Buggy Latole) 2hS6'0T' - 33. Nival-Gaillard (VW 1300) 3hoo'02" - 34. Voyeux-Lemoine (Lada Niva)3h06'14" - 35. Berger-Shepherd (Lada Niva)3hll '48"
36, Edde-Grebonval (Peugeot SOS) 3h14'03" (1 er groupe 3) . 37. Prevost-Fonatine (StrakitI3h17'51" - 38, Ra· bourdin-Dard (Renault 181 3h20'33" (1 er groupe 1)
39. Beaumont-Landier (R5 Alpine 4X4) 3h22'34" - 40. Da Silva-Da Silva (Lada Niva)3h33'23"